Balade en forêt – épisode 2

Épisode précédant

par Étienne Tellant

En franchissant le portail de l’entrée Soleil Palmyre, je laisse derrière moi ma voiture sur le parking et m’enfonce, un peu à contre-cœur, dans la forêt privée de la Coubre. Les premiers éléments qui témoignent de cette privatisation sont réconfortants, ils évoquent les parcs protégés canadiens ; toilettes sèches entretenues dans des cabanes en bois propres et élégantes – dans leur style  – chemins dégagés et directions indiquées.
À ce point de ma balade, s’offrent à moi deux options, deux chemins qui me garantissent des avantages spécifiques. Sur ma gauche, je peux prendre la route des chevreuils. Sur ma droite, la route des champignons. Sous les titres indiqués en lettres capitales, des illustrations présentent d’un côté de joyeux bidules en formes de champignons approximatifs, souriant à pleine bouche, de l’autre, une créature qui ressemble à une imitation sans effort du portrait de Bambi. Ce dernier est vraiment trop déprimant et me convainc d’emprunter la direction des champignons. Un second panneau, quelques mètres plus loin, me félicite de ma décision et me garantit la présence de champignons dans le sol, que je peux m’amuser à observer et ramasser. Tous sont certifiés comestibles, les champignons toxiques ont été éradiqués de la forêt grâce au développement du programme Campagne Santé. Je n’ai pas la moindre idée de la manière par laquelle on a bien pu procéder pour éradiquer des espèces entières de champignons mais je soupçonne une initiative condamnable. Mais il semble justement que la forêt ait été à plusieurs reprises condamnée en jugement pour empoisonnement et que la décision ait été prise, à l’issue de la série de procès, de recourir au contrôle des pousses.
Je m’égare – si je puis dire puisqu’il paraît difficile de s’y perdre – dans la forêt, et joue, à présent le jeu de la chasse en surveillant attentivement les abords de mes pieds pour y trouver, peut-être, les champignons promis. L’effort de pacotille est d’ailleurs rapidement récompensé car je découvre avec enthousiasme une quantité illimitée de cèpes des pins et de girolles. Je me penche pour en récolter une poignée et me retrouve frustré de ne pas avoir pensé à emporter ne serait-ce qu’un tote bag pour y mettre quelques spécimens supplémentaires.
Ma promenade a à peine commencé et me voilà déjà chargé comme une mule quand, cent mètres et douze champignons plus loin, les bras chargés jusqu’aux épaules, j’aperçois une petite niche en bois, doté d’un toit comme celui d’un nichoir à oiseaux. Cette niche-là distribue côte à côte des sacs roses dont l’usage est recommandé pour le ramassage des déjections canines et des sacs verts pour la cueillette aux champignons. Ma veine ! J’en prends deux, remplis le premier avec les gains de ma première cueillette et retourne au début du sentier pour en remplir un second. J’imagine ma poêlée de ce soir et me sens soudain d’une excellente humeur. Je voudrais confirmer à qui veut l’entendre le bienfait d’une balade en forêt !
De retour sur le seuil de l’entrée Palmyre Soleil, une famille retenue sur le côté du parking par deux agents de sécurité semble essayer difficilement de se défendre d’une situation dont les enjeux m’échappent absolument. Je ne les connais pas mais je ressens une empathie profonde à leur égard.
Je passe le portillon pour rejoindre mon véhicule quand une gardienne homologuée interrompt ma démarche. « Monsieur, service des douanes ! »
à suivre


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